dimanche 23 mars 2014

Interview de Stephan Pelissier, auteur de "Paris-Baltimore"

Paris-Baltimore

StephanPelissier est l’auteur d’un petit roman étonnant, plein de peps, nous laissant sur une fin très ouverte, et une très grande envie d’en lire davantage !
Paris-Baltimore est sorti au mois de janvier en format numérique, et sortira au mois de septembre 2014 en format papier chez Akibook.

Akibooks

Comme d’habitude, voulant aller à la pêche aux auteurs, je lui ai posé des questions… Des questions qui fâchent, qui mettent dans l’embarras, qui font plaisir, autant de questions pour mettre « à nu » ce jeune auteur français.
Bien sûr en tout bien tout honneur, je ne voudrais pas avoir des ennuis avec la femme de Stephan !
C’est parti…


Audrey : Depuis quand as-tu réellement commencé à écrire, à coucher une histoire sur le papier ?

Stephan : J’ai réellement commencé à écrire à la fin de l’adolescence, après que ma sensibilité m’ait déséquilibré. Au début, des poèmes et des nouvelles. Mais, c’est plus tard que je me suis mis au roman. Je n’avais sans doute pas grand-chose à dire avant.

Audrey : Comment est venue l’idée initiale du roman ?

Stephan : A la base, j’avais écrit la nouvelle qui apparaît au début de Paris-Baltimore. Puis, j’ai voulu apporter une touche plus « trash », d’où l’idée de faire réécrire la nouvelle par Cal en porno soft. Pourquoi ? Parce que le sexe est partout aujourd’hui. Dans le roman, je fais dire à Cal « qu’on passe la plupart du temps à penser au cul et à la mort ». C’est ce que m’inspire la société aujourd’hui. Prenez les pubs à la télé, on vous fait voir des femmes à poil pour vendre des yaourts. Et si vous ne pratiquez pas l’échangisme, c’est que vous êtes coincés. On fustige l’Islam mais on voudrait être polygame. Tenez l’autre fois, je tombe sur une revue « tendance » qui titrait « je suis fidèle, c’est grave ? ». Je crois que tout est dit.

Audrey : As-tu déjà mis les pieds à Baltimore, pourquoi cette ville ? Qu’évoque ce contexte pour toi?

Stephan : Non jamais, mais ce n’est pas la question. Le nom « Baltimore » évoque tantôt  pour moi la nostalgie de quelque chose de perdu,  tantôt une sorte de rêve américain, c’est un peu mon « Rosebud » à moi.

Audrey : As-tu voulu te rapprocher d’un genre particulier, de certains auteurs ? Marina, une amie, (elle se reconnaîtra et toi aussi), m’a dit avoir trouvé une touche de Frédéric Beigbeder dans ton style ? Es-tu d’accord ?

Stephan : Je ne sais pas si Marina a raison, mais je le prends pour un compliment. C’est vrai que j’aime bien Beigbeder. J’évoquais l’autre fois son roman sur le 11 Septembre « Windows on the World », un chef d’œuvre. L’histoire est simple. Comment se représenter ce qui s’est passé en haut des tours ce jour-là. Rien de plus vrai que de l’inventer. Tellement la réalité a dépassé la fiction. C’est l’idée du livre. En plus, sa structure est intéressante. Je persiste à penser que Beigbeder devrait écrire des tragédies, c’est là qu’il est le meilleur. Pour revenir sur la forme de « Paris-Baltimore », j’ai voulu imprimer du rythme, un style direct et percutant. Au risque de paraître familier parfois. Et puis, l’idée d’écrire des phrases de 15 lignes, ce n’est pas trop mon truc.

Audrey : Es-tu conscient qu’avec la fin que tu nous as offert, tu vas frustrer pas mal de lecteurs, surtout des lectrices qui aiment les happy-end, et les fins accomplies ?

Stephan : Au contraire, je pense que beaucoup se retrouvent dans cette fin. Tout le monde est passé par ces moments. Parfois, ça fait du bien de voir que d’autres ont vécu les mêmes choses que vous. Et puis, la fin reste ouverte. Selon que l’on est optimiste ou pas… Et puis, si vous voulez des happy-end, vous n’avez qu’à regarder les films de Reese Witherspoon.

Audrey : Bon les questions qui fâchent. Moi j’ai trouvé que tu usais beaucoup trop du langage familier et des terminologies américaines; et comme je suis une mauvaise langue, je dirais que c’est pour plaire au plus grand nombre, pour « la jouer commercial », pour plaire à ceux qui ne lisent pas souvent. Allez vas-y défend ton travail, qu’aurais-tu à me répondre ?

Stephan : Honnêtement, j’en sais rien. Sur le style, c’est venu naturellement, je ne me suis pas forcé. Après, comme je l’ai dit plus haut, j’ai du mal avec une certaine littérature trop conventionnelle et des phrases à rallonge. Je pensais que tu allais plutôt me questionner sur la structure du livre qui, pour le coup, est assez déstructurée. Paragraphes courts, ellipses, et flahs backs. C’est même mon éditeur qui m’a demandé de rajouter des chapitres. Après, bien sur qu’on veut plaire au plus grand nombre. Ceux qui me disent « j’écris pour moi pas pour les autres » me font marrer. On court tous après une reconnaissance. Parce qu’on veut tous être davantage aimé, respecté et considéré. Ça c’est la vérité. Le reste, c’est du vent. Après, ça n’empêche pas d’être sincère et vrai.

Audrey : Avec une fin pareille, y aura-t-il une suite à Paris-Baltimore ? Sur quel projet travailles-tu actuellement ?

Stephan : J’ai commencé une suite à Paris-Baltimore parce que j’ai le sentiment d’être passé un peu vite sur l’histoire d’amour avec Julia ou le parcours de Cal. Et j’ai des idées de rebondissements. Mais tout ça n’est pas encore très formalisé.
Après, j’ai bien avancé sur mon second roman qui a pour toile de fond une NDE ou EMI (expérience de mort imminente). Mais le livre ne sera pas du tout de la SF, simplement une comédie dramatique. L’histoire d’un événement qui va bouleverser la vie d’un homme et bousculer ses conceptions. Lui faire voir la vie d’une autre façon. Il y aura toujours des ressorts comiques, car on peut faire passer beaucoup de choses par l’humour. Souvent les situations comiques sont les plus dramatiques, à bien y réfléchir…

Audrey : Qu’est-ce qui t’a poussé à dresser le portrait d’un antihéros, d’un véritable « looser attachant », plutôt que d’un héros qui va toutes nous faire rêver ?

Stephan : Avant les héros étaient des hommes politiques, des chercheurs, des navigateurs, aujourd’hui c’est les racailles, les bad-boys, ou les joueurs de l’équipe de France de football… Dresser le portrait de quelqu’un à qui tout réussi ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, c’est les contradictions chez les autres ou dans les personnages. Rien n’est ni noir ni blanc. Cal est peut-être un salaud par certains côtés, mais il nous renvoie surtout l’image de nous-même. Il est animé par des bons sentiments, mais cela se traduit tout autrement dans la réalité. Il est faillible, c’est ce qui le rend  humain, donc on peut se le représenter. Il nous parle, enfin je crois. Et puis au bout du bout, il aura ce qu’il mérite. Je sais c’est très Judéo-Chrétien dit comme ça, mais il y a un côté « rédemption » dans tout ça. Et dans la suite aussi… ;- )

Audrey : Comment as-tu abordé la sortie de ton roman numérique ? Comment se prépare la future sortie papier ?

Stephan : Le marché du livre ne se porte pas super bien. Et les éditeurs « papier » hésitent de plus en plus à publier des inconnus ou des premiers romans. La prise de risque financière est trop importante. Résultat, j’ai l’impression que la littérature est de plus en plus « formatée » avec les « majors » de l’Edition. Les livres se ressemblent.
Le numérique permet la prise de risque chez les éditeurs. Résultat, de plus en plus d’auteurs sont mis en lumière. Et donc des littératures différentes sont proposées. J’ai profité de l’effet d’aubaine. Après, j’ai la chance que mon éditeur (AKIBOOKS), numérique à la base, se mette aussi au papier.
Par contre, ce qui me gonfle, ce sont ceux qui opposent systématiquement le papier au numérique. Ceux-là se trompent de combat. Je me fous du contenant. C’est le contenu qui m’intéresse. On peut boire de la piquette dans des verres en cristal et un grand crû  dans un gobelet, non ?
La promotion, par contre, est le plus difficile quand vous débutez, car vous ne connaissez pas les codes, les rouages, et surtout vous n’avez pas le réseau. Et puis, la lecture numérique plafonne encore en France contrairement aux pays anglo-saxons. Heureusement, j’ai rencontré des « bloggers » sur le net, essentiellement sur Twitter et un peu sur facebook. Des passionnés qui cumulent souvent un job à temps plein, des contraintes familiales et autres mais qui prennent le temps de lire. Et surtout de faire découvrir de nouveaux auteurs, de tous les styles, toutes sortes de littérature. Par exemple, Cédric alias @fnacbooker sur Twitter qui lit deux ou trois livres par semaine, les critique toujours avec justesse et profondeur. Sans parler de toi Audrey et du travail que vous faites avec Alily en faveur des livres.
Je prépare aussi des participations à des salons du livre, qui permettra d’aller à la rencontre des lecteurs. Le virtuel c’est bien, mais rien ne remplace le contact, les rencontres improbables.

Audrey : Es-tu présent, comme nombre d’auteurs, sur la « Blogosphère », toutes ces pages où lecteurs, auteurs et éditeurs donnent leurs avis ?

Stephan : Comme je l’ai dit tout à l’heure, je suis sur les réseaux, ebook oblige. Je suis surtout sur Twitter (@s_pelissier). J’ai commencé sur ce réseau, c’est donc plus familier pour moi. J’ai aussi une page facebook « Auteur » depuis peu.
Mais, je n’ai pas toujours le temps de parcourir les « profils » des personnes qui sont abonnées à mon compte. C’est un peu frustrant. On peut rarement nouer de vraies relations, mais ça arrive heureusement comme je l’ai mentionné plus haut.

Audrey : Quel est ton genre de lectures de prédilection ? Tes auteurs, ou titres incontournables ?

Stephan : Je sais que je ne devrais pas dire ça, mais je suis plutôt littérature américaine. Hémingway, Scott Fitzgérald, Steinbeck, Tennessee Williams. Pour les plus récents,  Brett Easton Ellis, DeLillo, McInerney notamment.

Audrey : Ton dernier coup de cœur ?

Stephan : « L’homme qui tombe » de Delillo. Roman post 11 septembre. Un chef d’œuvre également !


Merci à Stephan Pelissier pour sa disponibilité !


Vous pouvez le retrouver sur sa page facebook !

2 commentaires:

  1. Excellent, cet article. On vit tous la même chose, hélas mais aussi heureusement.
    Qui ose, gagne lit-on dans L'Affaire Harry Quebert de Dicker. Pelissier a osé, qu'il gagne.
    Et le Delillo dont il parle est un véritable chef-d'oeuvre. A recommander sans hésitation.

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  2. Bonsoir Bénédicte, merci pour votre message très chaleureux, cela m'encourage à défendre encore plus Paris-Baltimore. Je vais découvrir Dicker que je ne connais pas. Merci encore, au plaisir, Cordialement, Stéphan

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